Leonardo Vinci: Artaserse; Philippe Jaroussky (Artaserse), Max Emanuel Cencic (Mandane), Franco Fagioli (Arbace), Valer Barna-Sabadus (Semira), Yuriy Mynenko (Megabise), Juan Sancho (Artabano), Concerto Köln & Coro della Radiotelevisione Svizzera, Diego Fasolis; 2 DVD Erato 2564632323; Image 16:9; Stéréo et surround; Live 11/12 (201') – Critique de Rémy Franck

Après avoir publié le coffret de CD, Erato propose maintenant deux DVD avec le live de l’Opéra de Nancy de ce superbe ‘Artaserse’, dernier opéra de Leonardo Vinci (1690 – 1730), composé sur un libretto de Metastasio et créé à Rome en l’année de la mort du compositeur. A cette époque, la Rome papale n’autorisa pas la présence de femmes sur les scènes des théâtres romains. Aussi, pour les six rôles de son ‘Artaserse’, Vinci en conçut-t-il cinq pour des castrats.

L’histoire de la succession ensanglantée de Serse, agrémentée des amours d’Artaserse pour Semira, fille de d’Artabano (qui a assassiné Serse), et d’Arbace, fils d’Artabano, pour Mandane, la sœur d’Artaserse, emploie donc deux rôles féminins et quatre rôles masculins. Seul le rôle d’Artabano est confié à un ténor. Les rôles des castrats, aujourd’hui tenus par de contre-ténors, caractérisent donc largement cette composition du baroque flamboyant.

Avec ses trois heures un quart de musique, ‘Artaserse’ est un vrai marathon pour contre-ténors, et Philippe Jaroussky, dans un bref entretien que j’avais avec lui à l’issue du spectacle, disait: « C’est du sport, je vous l’assure ». Mais il nous confia aussi qu’il adorait cette production parce qu’elle lui permettait de porter « de vrais costumes ». Effectivement, sur un plateau plutôt sobre mais efficace, la splendeur des costumes virtuosement dessinés par Helmut Stürmer est un des éléments forts de cette production. Ce sont des costumes somptueux, aux coloris contrastés et aux éclats dorés, luxueusement décorées et plissées, avec une panoplie de plumes et des perruques monumentales: l’œil a de quoi se régaler tout au long du spectacle.

L’autre atout de la production est la diversité des voix: Avec son timbre caractéristique et pur, une articulation sans faille et une forte projection, Philippe Jaroussky est un Artaserse souverain même dans ses plus graves tourments. Royal, ce roi!

En face de lui, son ami Arbace, injustement accusé du meurtre de Serse, un personnage déchiré entre la loyauté qu’il voue à son père, le vrai meurtrier, et son amour pour Mandane: l’Argentin Franco Fagioli est un ardent interprète de ce personnage auquel il donne une expressivité dramatique peu commune.

Max Emanuel Cencic campe une Mandane superbe, féminine jusque dans le moindre détail, avec une justesse de caractérisation et une précision stylistique extraordinaire. Sa fougue vocale est immense!

Dans l’autre rôle féminin, celui de Semira, nous retrouvons Valer Sabadus, une des plus riches voix de contre-ténors qu’on puisse imaginer. Il incarne une Semira fragile, irritée par les événements qui la perturbent, et ces plaintes vocales, superbement chantées, sont saisissantes de vérité.

L’excellent Yuriy Mynenkov complète le quintette en donnant un profil bien caractéristique et très intense à Megabise, le général intriguant d’Artabano. Le rôle de ce dernier est tenu par Juan Sancho qui impressionne par un grand sens dramatique.

Avec une imagination sans cesse renouvelée et une dynamique époustouflante, Diego Fasolis anime le ‘Concerto Köln’ à un jeu énergique et soutenant parfaitement bien les chanteurs dans leurs émotions vocales, donnant ainsi la touche finale à un spectacle qu’on ne peu que qualifier d’éblouissant.

Musically and visually outstanding, this production of Vinci’s Artaserse is breathtaking. The best possible quintet of countertenors, an excellent orchestra and an inspired conductor are matched by the sumptuous staging and the magnificent costumes. An unequalled baroque feast!

Die in Nancy aufgezeichnete Aufführung von Vincis ‘Artaserse’ vereint das vielleicht bestmögliche Countenor-Quintett sowie das prachtvoll spielende ‘Concerto Köln’ unter der immer wachen und inspirierten Leitung von Diego Fasolis. Der musikalischen Qualität entspricht die Einfallskraft der Regie und die Pracht der Kostüme. Ein Barockfest, wie man es sich superber nicht vorstellen kann!

 

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